Le 23 juin dernier, Éco-mobilier organisait sa deuxième rencontre nationale, deux ans après le succès de la première édition en 2014. Cette réunion, qui a rassemblé toutes les équipes de l’écoorganisme et les acteurs de la profession, était l’occasion de présenter le bilan des actions de ces derniers mois, profiter du retour d’expérience de tous les acteurs impliqués et poser les défis que devra relever la filière dans l’avenir.
C’est à Jean-Thierry Catrice, Président d’Éco-mobilier, et Dominique Mignon, Directrice générale, qu’a incombé la responsabilité d’ouvrir cette rencontre, avec un constat très positif : « Aujourd’hui, 86 % de nos meubles collectés sont valorisés, un chiffre nettement au-dessus des attentes qui nous avaient été données par les administrations, suite au Grenelle de l’environnement notamment ». Et pour valoriser encore davantage, Jean-Thierry Catrice est catégorique : il faudra mettre en place un vrai travail d’équipe « avec les fabricants et distributeurs, mais aussi avec les collectivités locales, avec les administrations, et avec tous les partenaires dans cette chaîne de valeur ».
Et cela commence par la pérennité du dialogue, l’objectif premier de cette rencontre.
Dominique Mignon, Directrice générale d’Éco-mobilier, a à son tour pris la parole pour rappeler que la valeur ajoutée d’Éco-mobilier résidait dans son opérabilité, que l’éco-organisme doit en grande partie à l’implication de tous les acteurs de la filière : « Dès le départ, les metteurs en marché se sont impliqués dans la mise en oeuvre des opérations de ramassage, de tri, de valorisation au travers de nos partenaires de collectes et de traitements ». Opérabilité à laquelle s’ajoute une vraie responsabilité de la part d’Écomobilier vis-à-vis de ces mêmes acteurs : « les industriels du recyclage, afin de pouvoir mettre en place une économie circulaire stable dans la durée et investir dans les outils de tri ou dans l’innovation, doivent pouvoir compter sur une certaine quantité de matériaux. L’intervention à toutes les échelles territoriales d’Éco-mobilier permet effectivement de massifier ces volumes ». Mais aussi des consommateurs : « l’éco-participation payée par les consommateurs est un impératif pour Éco-mobilier et nos partenaires industriels de recyclage de tenir la promesse du recyclage et de la valorisation ». En effet, en 2015, les metteurs en marché, les fabricants, les distributeurs ont mis en marché plus de 228 millions d’unités de meubles, ce qui a permis à Éco-mobilier de collecter 126.700.000 € d’éco-participation. À ce propos Jean-Thierry Catrice ajoute : « les consommateurs, au même titre que les fabricants ou les distributeurs – attendent que le fruit de cette écoparticipation serve à traiter convenablement le produit dans sa fin de vie et que cette économie circulaire puisse générer un nouveau type de valeur ajoutée ».
Introduction : Éco-mobilier, un acteur majeur de l’économie circulaire
Éco-mobilier s’est imposé comme un acteur de l’économie circulaire, et possède ses valeurs dans son ADN. Parmi les sept axes qui constituent l’économie circulaire (l’éco-conception, la symbiose industrielle, les logiques de ressources, l’économie de la fonctionnalité, le réemploi, la réparation, la réutilisation et le recyclage) Éric Weisman, Directeur du développement d’Éco-mobilier, a choisi d’en illustrer trois, particulièrement chers à l’écoorganisme, en débutant par l’éco-conception. Ainsi, en 2015, les équipes d’Éco-mobilier ont mis en place des groupes de travail, sillonné la France afin d’organiser des réunions, et réfléchir à cette problématique. De ce travail résulte un document synthétique, le Guide de l’éco-conception, qui sera disponible dès septembre 2016, afin d’accompagner les fabricants et les distributeurs de meubles par exemple.
Deuxième sujet abordé, celui de la réutilisation et du réemploi, une issue privilégiée par Éco-mobilier. Ainsi, « chaque fois qu’on peut détourner un meuble de la benne, pour le réutiliser ou le réemployer, on fait oeuvre utile, on prolonge aussi sa durée de vie » explique Éric Weisman. Pour réussir dans cette mission, Écomobilier travaille de concert avec le Réseau Emmaüs et le Réseau des Ressourceries : 50 000 tonnes de mobiliers usagés ont ainsi été captées, puis remis en circulation.
Dernier cas, celui du recyclage. Parmi les 86% de mobiliers valorisés, 55 % le sont par le biais du recyclage, une activité à laquelle Éco-mobilier associe en premier lieu les opérateurs en charge de la collecte, du tri et de la préparation des matières premières secondaires.
Dans un contexte économique difficile, l’économie circulaire pourrait être la clef. Dominique Potier, député de Meurthe-et-Moselle, était présent pour témoigner de son importance, et du rôle d’acteurs comme Éco-mobilier pour redynamiser une économie. En 2008, la fermeture de l’usine Michelin de Toul provoque un séisme dans sa région. Dominique Potier fait alors le pari de l’économie circulaire et plus particulièrement d’un cluster recyclage pour créer de l’emploi, changer le regard sur les produits et donner des opportunités de développement aux PME. Très vite l’entreprise Envie2E s’y déploie et devient l’un des sept sites qui accueillent aujourd’hui le positionnement du recyclage des matelas en France. Des activités de collecte et démembrement qui s’accompagnent d’un axe de recherche et développement, en partie financé par Éco-mobilier, et de recyclerie.
Le succès de l’opération à Toul est un exemple mais aussi une motivation pour Éco-mobilier qui souhaite favoriser l’implantation de l’économie circulaire dans les territoires. Mais pour cela, « il faut ouvrir de nouvelles pistes pour l’avenir, notamment sur le plan législatif en créant des fiscalités plus incitatives à l’utilisation de matériaux recyclés dans les produits par exemple » intervient Dominique Mignon.
Au député Dominique Potier de conclure sur ce point : « Nous avons un impératif absolu, c’est de fixer des limites, des limites qui soient considérées comme des chances et des conditions d’investissement pour une économie circulaire, pour des écosystèmes durables » avant d’affirmer : « je suis persuadé qu’en redonnant de la valeur à la matière et aux objets dans leur vie et leur seconde vie, nous contribuons à une certaine dignité de l’oeuvre et de l’homme par-là même ».
De nouvelles innovations en matière de recyclage
Pour introduire cette première table-ronde, les différents intervenants s’accordent à dire que la recherche et développement est une activité primordiale dans le recyclage, qui fait naître de nouvelles innovations.
Pour illustrer ses propos, Frédéric Bataille, Directeur général et Directeur de Recherche Biomasse chez Valagro Carbone Renouvelable, aime utiliser le terme d’« upcyclage ». Il s’agit d’accorder plus de sens à la réutilisation du produit, d’améliorer ou de maintenir la qualité du déchet tout en gardant une valeur économique forte.
La recherche & développement chez Valadro est une activité importante pour développer l’innovation. Il prend alors l’exemple du bois, qui est une source très intéressante car elle regorge de molécules, appelées « molécules plates-formes » qui vont permettre, après un travail de fractionnement, de séparation, de purification, de créer des carburants, des plastiques et des matières nouvelles. C’est une réelle chimie du bois qui se développe depuis une dizaine d’années.
Franck Berrebi, Co-fondateur et Président de Recyc Matelas Europe est intervenu en rappelant que « 99% des matelas terminaient dans les centres d’enfouissement, donc dans un centre de stockage qui n’avait pas de vertu écologique ». Il s’est donc posé la question du recyclage de ces derniers et de la manière de les démanteler de façon mécanisée. Il s’est alors intéressé à leur composition et a construit des partenariats avec des filières en capacité de transformer les matières. « On a été voir des industriels de l’ameublement, de la literie, certains petits distributeurs. Et on a été prendre les cahiers des charges des utilisateurs de produits finaux, des distributeurs, de fabricants de certains produits, et puis, on a été voir les transformateurs mais en les utilisant différemment. Et là, aujourd’hui, ça nous permet de pouvoir commencer à mettre en marché des matières, des produits finis ou semi-finis » a-t-il expliqué.
Avec ses partenariats stratégiques, la société Recyc Matelas Europe commercialise aujourd’hui des couvertures de déménagement à partir des textiles issus des matelas, fabrique des banquettes à partir des mousses… et met ainsi en marché des produits qui n’ont aucun problème d’hygiène, aussi qualitatifs que
ses concurrents, à prix plus discount.
Ainsi, afin que cette filière ne cesse de progresser et multiplier l’innovation en matière de recyclage, les metteurs en marché, distributeurs et fabricants, Éco-mobilier inclus, doivent intégrer de plus en plus de matières recyclées dans l’ameublement et les autres filières pour substituer aux matières nobles.
L’animateur Eric Revel, journaliste économique, David Soulard, Directeur Général GAUTIER, Franck Berrebi, co-fondateur et Président de RECYC MATELAS EUROPE, Alexandre Nodale, Président-Directeur général CONFORAMA, Éric Weisman, Bernard Harambillet, Directeur général France de l’activité Recyclage et Valorisation des Déchets, VEOLIA, Éric Buffo, Directeur général adjoint Exploitation et Développement SMICVAL LIBOURNAIS, Frédéric Bataille, Directeur général et Directeur de Recherche Biomasse, VALAGRO CARBONE RENOUVELABLE
L’économie circulaire au service de l’emploi et des relations partenaires…
Pour continuer cette première table-ronde, Bernard Harambillet, Directeur général France de l’activité Recyclage et Valorisation des déchets chez Veolia, rappelle la participation active d’Éco-mobilier en tant qu’éco-organisme qui permet un réel échange entre les metteurs sur le marché et les recycleurs.
Il rajoute qu’aujourd’hui, les relations se font entre clients, fournisseurs et partenaires, mais qu’il va falloir inventer de nouveaux modes de collaboration, « trouver des collaborations contractuelles sur les durées compatibles avec des durées d’investissements ». Créer des partenariats de longue durée est l’objectif de demain pour Éco-mobilier.
Alexandre Nodale, Président-Directeur de Conforama qualifie d’exceptionnel le rapport que le distributeur entretient avec Éco-mobilier. Les actionnaires, qui sont à la fois des fabricants et des distributeurs, travaillent ensemble non pas dans un climat de concurrence mais de promotion du développement d’Écomobilier. Et ce sont grâce à ces relations de confiance entre chaque partenaire que le développement d’Éco-mobilier n’a cessé de croitre depuis sa création et qui fait de l’éco-organisme, une filière ambitieuse.
Sur la question de l’économie circulaire, Eric Buffo, Directeur général adjoint Exploitation et Développement du SMICVAL du Libournais Haute Gironde, explique qu’il souhaite en faire « un vecteur de développement économique local parce que le contenu en emplois du recyclage et du réemploi des déchets est largement supérieur à celui du traitement ». Le syndicat a alors misé sur le rassemblement des intercommunalités, des agglomérations et des comités de communes pour favoriser le développement de cette économie et créer de nouveaux emplois. Le but étant que ces déchets se transforment en ressources
avec des modèles économiques différents, parmi eux, des circuits courts.
Les différents intervenants conviennent ainsi à dire qu’Éco-mobilier joue un rôle majeur dans les relations avec ses partenaires et que l’éco-organisme est indispensable au bon fonctionnement du recyclage de la filière du meuble.
… qui contribue au changement des mentalités
Eric Buffo ajoute qu’avec l’économie circulaire, « c’est un changement de regard et de comportement de l’usager sur le tri » qui s’annonce à eux et qu’il faut faire en sorte que « le déchet ne soit plus de la déjection mais plutôt un produit ou un matériau ». À ce titre, un des projets du SMICVAL est de construire un équipement où l’usager se retrouverait dans un « supermarché inversé » où il pourra donner ce qu’il souhaite recycler à la réparation dans l’optique de pouvoir le reprendre par la suite et non pas le jeter et de s’en débarrasser. Sur l’ameublement, Éco-mobilier souhaite ainsi s’associer au projet en proposant un bureau d’études afin d’analyser le comportement de l’habitant et contribuer au changement de son regard et de son comportement.
Alexandre Nodale, Président-directeur général de Conforama, approuve en ajoutant qu’il y a un vrai changement des mentalités concernant les nouvelles générations et que « ce sera un avantage de pouvoir mettre en avant cette économie circulaire et ce recyclage ».
Il précise qu’en tant que distributeur, la communication vis-à-vis des clients est très importante. Les metteurs sur le marché ont un rôle sociétal à jouer, ils doivent adopter le bon comportement et avoir une démarche responsable. Le consommateur y est de plus en plus réceptif et les jeunes générations y
attachent plus d’importance qu’auparavant.
Le Président de Conforama reste néanmoins lucide sur la question de l’économie collaborativ